Et si soigner son microbiote nous permettait d’être en bonne santé !

Qu’est-ce le microbiote et comment interagit-il avec son hôte ?
En quoi la qualité de notre microbiote influe sur notre santé ?
Qu’est ce que la bactérie Akkermansia muciniphila ?
Comment s’alimenter pour avoir un bon microbiote ?

Article réalisé à partir d’études scientifiques
Le microbiote intestinal

Vous ne le savez peut-être pas et pourtant, notre corps héberge en permanence des milliers de tous petits êtres vivants. Des êtres si petit qu’on ne peut les voir à l’oeil nu : il s’agit des micro-organismes. Leur ensemble forme ce que l’on appelle la “flore intestinale” ou “flore commensale” ou plus simplement le “microbiote” (“micro” minuscule, “biote” organisme vivant). Il existe beaucoup de micro-organismes dont la nature diffère selon les espèces. Parmi eux nous comptons majoritairement des bactéries mais aussi plus minoritairement des virus, des champignons, des archées et des eucaryotes. Dans les bactéries, nous différencions également :

– celles qui vivent en milieu oxygéné : elles sont présentes en début du tube digestif, c’est-à-dire au niveau de la bouche et de l’oesophage (bactérie roses et jaunes sur le schéma),
– celles qui au contraire fonctionnent sans oxygène, ce sont les bactéries de l’estomac et des intestins (bactérie rouges, bleues et vertes),
– celles qui préfèrent les milieux acides, comme dans l’estomac (bactérie rouges),
– ou moins acides, dans les intestins (bactérie bleues et vertes) [1,2].

Donc des micro-organismes, il y en a partout tout au long du tube digestif. Il y en a du sol au plafond comme on dit !
Si ce microbiote vie et prospère en nous, notre organisme ne les héberge pas gratuitement. Il y a un échange. Lorsque notre flore est “équilibrée”, celle-ci a un rôle essentielle pour notre santé. Sans micro-organismes, nous tomberions toujours malades et ne pourrions digérer correctement ! Ainsi nous vivons en symbiose : nous sommes leur lieu de vie, elles sont notre santé.

Une flore intestinale propre à chacun

Si nos organes ont toujours plus ou moins la même forme, notre flore elle, varie d’une personne à une autre et n’est jamais fixe dans le temps. Vous pouvez avoir un certain microbiote à 10 ans et ne plus avoir le même à l’adolescence ou à l’âge adulte [1]. Sa composition va dépendre : 

– Du type d’accouchement par lequel vous êtes né(e) : naissance par césarienne ou voie basse, 
– De l’alimentation quotidienne : variée ou non, maison ou industrielle, biologique ou non et des types d’aliments consommés régulièrement (végétaux, viandes, féculents, aliments sucrés ect).
– De l’environnement extérieur : vivre à la campagne ou en ville, avec des animaux ou sans, être à proximité de la montagne ou à la mer ect. 
– De l’environnement intérieur : stress chronique, consommation régulière de tabac, d’alcool, prises médicamenteuses fréquentes ect [3].

La flore intestinale « type » n’existe donc pas. Elle est particulièrement spécifique à chacun autant du point de vue de la diversité que de la quantité [4]

Des bactéries qui communiquent avec nos intestins et notre cerveau 

Et oui, cela parait incroyable ! Certaines bactéries sont capables d’interagir avec nos intestins et même communiquer avec notre cerveau.
Alors comment ça se passe concrêtement ? Grâce aux travaux avisés de l’INSERM sur le Microbiote intestinal [3], nous en savons un peu plus sur ces mécanismes :

  1. Logées dans les muqueuses digestives, les bactéries se nourrissent des nutriments et fibres végétales que nous leur apportons via notre alimentation. 

  2. À partir de la consommation de ces fibres, ces bactéries rejètent des déchets dont les fameux gaz (dit “butyrate” scientifiquement), mais aussi des actifs comme les vitamines K, B12 et B8. Elles produisent aussi du mucus (très important !) dans lequel elles vivent et prolifèrent, ainsi que des neuropeptides. D‘après les travaux de Sylvie RABOT [4], ce sont ces neuropeptides qui auraient la capacité d’interagir avec les intestins. En se fixant sur leurs récepteurs neuronaux, ils pourraient moduler les contractions musculaires des intestins et ainsi agir sur le transit : soit en l’accélérant soit en le ralentissant. Un rééquilibrage du microbiote pourrait donc améliorer les problèmes de constipations et de diarrhées. 
     

  3. Sur un autre niveau, les neuropeptides pourraient également rejoindre le cerveau par traversé de l’épithélium intestinal, irrigation par voies sanguines et passage de la barrière hémato-encéphalique. En fonction de la nature de l’actif, le cerveau modéliserait une réponse en adéquation avec le signal reçu [4]. Notre microbiote pourrait ainsi jouer :
    – sur la sécrétion de nos hormones : insuline, glucagon, cortisol, hormones thyroïdiennes, hormones de faim et hormones sexuelles.
    – sur notre capacité à utiliser l’énergie (c’est-à-dire notre tendance à stocker ou déstocker facilement les graisses),
    – sur le métabolisme de telle ou telle réaction biochimique. Ça aurait un impact sur notre forme ou notre fatigue.
    – mais aussi sur l’influence de nos envies alimentaires !

  4. Par exemple, si je consomme régulièrement une grande quantité d’aliments sucrés industriels, je vais développer certaines souches dans mon intestin qui aiment le sucre. Et donc, il y a de fortes chances que ces bactéries m’incitent à continuer de manger du sucre*A l’inverse, si j’ai une alimentation variée (avec des végétaux, des sucres naturels, des produits animaliers, des féculents et des graisses de bonne qualité), je vais intégrer une plus grande diversité microbienne, une plus grande quantité de mucus protecteur et être plus facilement attiré par les aliments sains et nutritifs dont j’ai besoin [5]

    *Nb dans le 1er cas :
    Le déséquilibre alimentaire va engendrer le développement limitée de nouvelles souches microbiotiques et appauvrir la flore intestinale. À la longue, la protection des muqueuses risque d’être fragilisée et entrainer l’altération des parois digestives. Cela peut aboutir à une moins bonne assimilation des nutriments, à un dérèglement du transit, à de l’inflammation (arthrose, problèmes de peau, stress), à des douleurs digestives voire même à des intolérances alimentaires et de la perméabilité intestinale !


la bactérie AKKERMANSIA MUCINIPHILA : la bactérie minceur !

Un autre scientifique Patrice CANI, a également fait une découverte surprenante en 2007. Suite à ces expériences sur le microbiote intestinal : il a remarqué que la bactérie Akkermansia muciniphila bien présente chez les personnes en bonne santé était presque absente dans la flore intestinale des personnes en surpoids, en obésité ou en diabète [6]. A partir de ces observations, d’autres recherches sont nées dans l’objectifs de comprendre de quelle manière ces bactéries agiraient en faveur d’une bonne santé. Entre autres, les expérimentations invitro des chercheurs de l’AEM [6] ont montré que A. muciniphila (bactérie Gram négatif anaérobie aérobietolérante) améliorerait le métabolisme des souris diabétiques de type 2 par restauration de la couche mucilagineuse qui entoure et protège nos cellules intestinales [6]. C’est en effet grâce à cette couche mucilagineuse que la bactérie communique avec nos entérocytes (cellules intestinales) en activant des gènes qui permettent une meilleure utilisation de l’énergie [6]. Ainsi, la présence de A. muciniphila permettrait de lutter efficacement contre l’apparition du diabète, la prise de poids et contre l’endommagement de la barrière intestinale (appelé endotoxémie) [6]. De plus, le maintien d’une couche épaisse de mucus dans les voies digestives permet une colonisation plus aisée des espèces bactériennes bénéfiques pour la santé [6]. La présence de cet écosystème diversifié et d’A. muciniphila en grande quantité nous amènerait donc plus facilement à rester mince et en bonne santé tout au long de notre vie.

Comment reconstituer la flore intestinale ?

Tout d’abord, le rééquilibrage l’alimentaire est essentiel. Le fait de diversifier les repas en utilisant de bons produits cuisinés maison va permettre l’implantation de nouvelles souches microbiotiques saines (dont la souche Akkermansia muciniphila et toutes les autres bonnes bactéries). Ensuite, selon s’il y a des intolérances alimentaires, il serait préférable de limiter voire supprimer les aliments qui posent problème : ça peut être le gluten, le lactose, certaines fibres ect. Avec l’aide d’un(e) diététicien(ne) vous pourrez les identifier facilement et mettre en place une alimentation adaptée.

En règle générale, nous n’aurions pas besoin de compléments alimentaires. Seulement, même avec le changement d’alimentation un intestin abîmé peut mettre plusieurs semaines, plusieurs mois et voire quelques années à se reconstruire et accepter un nouveau microbiote. La prise de probiotiques (bactéries) et/ou prébiotiques (nourriture des bactéries) peut donc permettre d’aller plus vite dans le processus de guérison. Je vous recommande néanmoins, de vous rapprocher d’un diététicien ou praticien spécialisé dans la médecine naturelle afin de déterminer ensemble les compléments adaptés pour vous

Sources
  1. FOND Guillaume, Conférenve parue le 22 décembre 2016, « Le dialogue cerveau-microbiote intestinal (prébiotiques, probiotiques) », https://www.youtube.com/watch?v=Buxmexb7Ap8
  2. EL KAOUTARI Abdessamad, HENRISAT Bernard, Revue parue le 31 mars 2014, «Le microbiote intestinal et la digestion des polysccharides », vol 30, Numéro 3, pages 259-265,  https://www.medecinesciences.org/en/articles/medsci/full_html/2014/03/medsci20143003p259/medsci20143003p259.html
  3. BURCELIN Rémy, ZITVOGEL Laurence, FOND Guillaume, SOKOL Harry, Site mis à jour en février 2016 « Microbiote intestinal (flore intestinale), Une piste sérieuse pour comprendre l’origine de nombreuses maladies»  https://www.inserm.fr/information-en-sante/dossiers-information/microbiote-intestinal-flore-intestinale
  4. RABOT Sylvie, Revue parue le 15 octobre 2015, « Axe intestin-cerveau : comment le microbiote intestinal influence la réponse au stress »http://documents.irevues.inist.fr/bitstream/handle/2042/57938/AVF_168_3_10.pdf?sequence=1
  5. ROBER R.C, FARMER C.B, WALKER C.K, 6 Novembre 2018  “The human brain microbiome; there are bacteria in our brains”, consulté le 29/12/2018,   https://abstractsonline.com/pp8/#!/4649/presentation/32057
  6. REUNANEN Justus, SATOKARI Reetta, Article publié en Juin 2015, « Akkermansia muciniphila Adheres to Entocytes and Strengthens the Integrity of the Epithelial Cell Layer» Vol81, Numéro 11, consulté le 28/12/2018,  https://aem.asm.org/content/aem/81/11/3655.full.pdf